Les conditions juridiques d’existence du vice caché
Il est défini par l’Article 1641 du Code Civil, dans les termes suivants :
« Le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise ou n’en aurait donné qu’un moindre prix s’il les avait connus. »
Dans la pratique, il convient que les vices, dont la charge de la preuve incombe à l’acquéreur, soient cachés, antérieurs à la vente du véhicule (ou pour le moins existants en germe à cette date) et rendent l’automobile impropre à son usage, ce qui implique qu’ils présentent une gravité suffisante.
L’antériorité à la vente
Le vice doit avoir existé antérieurement à la vente ou à la livraison de la chose, ou encore avoir existé déjà à cette date à l’état de germe.
Tel est le cas par exemple d’un défaut de conception d’un moteur, défaut dont les conséquences peuvent se révéler des années plus tard.
Tel est le cas par exemple de certaines chaînes de distribution, qui rompent, en entraînant la destruction du moteur, plusieurs dizaines de milliers de kilomètres plusieurs années après la première mise en circulation du véhicule, en raison d’un défaut de conception.
Le caractère caché du vice
D’après l’Article 1642 du Code Civil :
« Le vendeur n’est pas tenu des vices apparents et dont l’acheteur a pu se convaincre lui-même. »
Sont apparents par exemple :
- une carrosserie abîmée,
- des pneus usés ou endommagés,
- des voyants allumés,
- un moteur bruyant,
- tous autres problèmes susceptibles d’être découverts au moment de l’essai du véhicule par un acquéreur normalement diligent.
Il en va a fortiori si les vices sont indiqués par le vendeur à l’acheteur (si le premier prouve qu’il a bien donné cette indication), ou par un procès-verbal de contrôle technique révélant des défauts.
Pour déterminer si le vice était ou non apparent, la jurisprudence tient compte de la qualité de l’acquéreur et distingue donc si l’acheteur était ou non un professionnel de l’automobile. Toutefois, il a pu être décidé que des vices indécelables constituaient des vices cachés, même pour un acheteur professionnel.
L’importance des vices
Ils doivent rendre le véhicule impropre à sa destination, ou en diminuer tellement l’usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquis ou n’en aurait donné qu’un prix moindre s’il les avait connus. L’usage essentiel d’un véhicule est de circuler sur des routes ouvertes.
C’est ainsi par exemple que des grosses réparations effectuées dans les règles de l’art ne rendent pas la voiture impropre à l’usage auquel elle était destinée.
Cass. Civ. 1ère, 17/06/10 – n°09-15843
La Cour de Cassation a nuancé sa position en cas de passage au marbre puisqu’en pareille espèce, si le véhicule peut normalement circuler, en revanche la possibilité de le revendre est considérablement réduite, ce qui constitue un défaut caché.
Cass. Civ.1ère, 11/12/13 – n°12-23372
De manière systématique, lorsque le véhicule est dangereux, il est considéré comme impropre à sa destination. Parfois, la jurisprudence va plus loin et retient que des véhicules parfaitement aptes à circuler sur route sont affectés de vices cachés lorsqu’ils présentent des défauts d’agrément importants, tel qu’un défaut d’étanchéité affectant le toit articulé d’un cabriolet, ou des bruits anormaux.
D’une manière générale, de telles décisions sont rendues lorsqu’il s’agit de véhicules prestigieux, dont l’acheteur peut légitimement attendre une qualité et un agrément sans faille.
Cass. Civ. 1ère, 07/03/00 – n°97-17511
L’action en vice caché
La charge de la preuve
Selon une jurisprudence constante, la charge de la preuve de l’existence d’un vice caché incombe à l’acheteur.
Pour rapporter cette preuve, il est souhaitable, voire dans la plupart des cas nécessaire, d’avoir préalablement recours à une expertise judiciaire ordonnée par le Juge des référés. Une expertise amiable, faite souvent par l’intermédiaire de techniciens mandatés par les assureurs protection juridique, est souvent considérée comme insuffisante par les tribunaux.
Procédure en résolution de vente
Dans le cadre de la procédure en résolution de vente, l’acheteur a le choix, soit de demander la résolution de la vente, c’est-à-dire le remboursement du prix payé contre la restitution de la voiture (on parle alors d’action rédhibitoire), soit de mettre en œuvre une action estimatoire, c’est-à-dire de conserver le véhicule, et d’obtenir le remboursement d’une partie du prix.
Le vendeur a seul la possibilité de choisir l’une ou l’autre action, sans que l’on puisse lui imposer une réparation du véhicule, ainsi qu’en a décidé notamment la Cour d’Appel de Lyon.
CA Lyon, 17/11/11 – n°09-08005
En revanche, si l’acheteur a accepté la réparation proposée par le vendeur, il ne peut pas poursuivre son action résolutoire, mais simplement solliciter l’indemnisation du préjudice éventuellement subi du fait du vice.
Cass. Com., 01/02/11 – n°10-11269
Cass. Civ. 1ère, 12/06/14 – n°13-11905
Les conséquences de la résolution de la vente
Le vendeur doit rembourser la totalité du prix payé, sans pouvoir prétendre à une diminution du fait de son usage. Cette solution est constante, et a récemment été rappelée par la Cour de Cassation.
Cass. Civ. 1ère, 21/03/06
Cass. Com., 22/05/12
Cass. Civ. 1ère, 19/02/14 – n°12-15.520
Une fois que le prix payé lui aura été remboursé, l’acquéreur doit alors restituer le véhicule, même de nombreuses années après, même s’il a effectué de très nombreux kilomètres, sans qu’aucune déduction ne puisse lui être faite, sauf celle éventuelle résultant d’un usage anormal. Enfin, le vendeur doit venir reprendre possession, à ses frais, de la voiture au domicile de l’acheteur.
En outre, il peut être tenu d’indemniser également la totalité des préjudices subis par l’acquéreur. Cela est automatique si le vendeur est un professionnel, car il est réputé connaître les vices. Si, en revanche, il est un particulier, l’acheteur devra démontrer qu’il avait connaissance de ces vices au moment de la vente.
Un simple particulier peut toutefois être considéré comme un professionnel, s’il est établi qu’il se livre habituellement à la vente de véhicule.
Cas. Civ. 1ère, 30/09/08 – n°07-16876
Les débiteurs de l’action en garantie des vices cachés
L’acquéreur peut mettre en œuvre une action à l’encontre de son propre vendeur, mais également du vendeur de celui-ci ou du fabriquant du produit litigieux. C’est ainsi par exemple qu’il peut mettre en cause le distributeur qui lui a vendu le véhicule, mais également le constructeur.
Si celui-ci est étranger, il convient d’être particulièrement vigilant car son représentant en France n’est pas nécessairement l’importateur des voitures de marque étrangère. En ce cas, et puisqu’il n’est pas partie à la chaîne contractuelle, il n’est pas possible de procéder par voie judiciaire à son encontre.
Les délais de prescription
L’action en vice caché obéit à une double prescription : d’une part, une prescription de 2 ans à compter de la découverte du vice, et d’autre part, de 5 ans à compter de la vente.
Cette dernière prescription peut paraître sévère, notamment lorsque des vices, existant en germe en raison d’une conception défectueuse du véhicule ou de l’un de ses organes, se révèlent des années plus tard, mais reste quand même pour l’essentiel raisonnable puisqu’un produit, quel qu’il soit, ne saurait être garanti éternellement.
Les actions à mettre en œuvre au titre de la résolution de la vente d’une voiture sont complexes et il est recommandable de se faire assister par l’intermédiaire d’un avocat spécialisé en droit de l’automobile.